Il y a quelques jours, alors que j’étais dans ma voiture pour aller chercher little G à la crèche, je vois au loin un petit garçon à un passage piéton, prêt à traverser. Il doit avoir 7-8 ans, porte un sac à dos bien trop gros pour lui, qu’il tente d’ailleurs de redresser sur ses épaules. Il regarde à gauche, à droite, mais pas une voiture ne s’arrête pour le laisser passer. Je le vois frigorifié, portant sa maison sur son dos et attendant patiemment son tour, mais en vain. Arrivée à sa distance, je m’arrête, lui fait un sourire et un petit signe pour lui dire de passer. Je regarde moi même devant et derrière pour vérifier qu’un scooter ne me dépasse pas et que la voiture d’en face le laisser aussi traverser, c’est le cas. Cette petite histoire pour dire quoi au juste ?
Tout ça pour dire qu’à ce moment précis j’ai eu un gros pincement au coeur pour ce petit garçon, et un brin d’énervement contre tous ces adultes, bien au chaud dans leurs voitures qui ne laissent même pas une minute à ce petit pour traverser la rue…et là je me suis dit mais mince pourquoi ? Sur tout le trajet je me suis rendue compte à quel point je tentais de protéger mon fils au quotidien, (oui je sais je réfléchis beaucoup trop en voiture!). Par des gestes quotidiens, par une certaine routine bien à lui, par une multitudes de petites choses. Tout cela s’est mis en place naturellement et sans trop se poser de questions.
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Oui parce que jusque là j’ai toujours trouvé cela assez facile de le protéger, « facile » dans le sens où il est tout le temps avec moi. Telle une maman louve, je l’ai couvé, protégé pendant des mois. Aujourd’hui à 18 mois ce n’est plus un petit bébé, il ressemble de plus en plus à un vrai petit garçon, avec son caractère, ses désirs et ses envies. Je vois bien que je ne peux plus protéger mon enfant comme au début de sa vie. Il grandit, il va à la crèche, il court vite, très vite, il est imprévisible et imaginatif. Je ne peux plus anticiper ses gestes et je dois redoubler de vigilance pour contrecarrer ses plans !
Mais au delà de le protéger des choses matérielles je voudrais tant le protéger de possibles souffrances…Je sais malheureusement que c’est inévitable et même nécessaire à sa construction. On a tous souffert que ce soit de nos problèmes familiaux, de soucis avec nos amis ou de nos peines de coeur. On n’y est pas encore je sais bien, mais je sais qu’il va être confronté à « la vraie vie », au monde en dehors de sa bulle et qu’il va falloir que je me blinde aussi un peu plus pour mieux l’appréhender. Sans même parler de demain, à l’heure actuelle il se fait parfois bousculer au parc, tapé à la crèche par d’autres enfants et même une fois mordre… Je sais bien qu’en soit ce n’est pas grave mais mon coeur se fissure à chaque fois un peu plus.
Je ne peux pas le couver plus que de raison, je fais tout pour limiter tout ça et pour retarder ces événements mais cela arrivera. Mon enfant va souffrir de petits tracas quotidien et je pense que ma place sera alors plutôt à ses côtés pour l’aider à les surmonter, que de les prendre tous sur mon dos. Mais je crois que c’est notre ressenti à tous en tant que parents, on voudrait pouvoir prendre leurs petites et grandes peines, mais malheureusement elles font parties de l’apprentissage de la vie.
J’espère juste que dans ces moments là je saurais être une oreille pour qu’il puisse se confier, une épaule pour le laisser pleurer et des bras pour le réconforter.
Et puis, lui promettre que ça passera.
Doux week-end
*** Flore ***
14 Comments
D’avoir partagé un corps à deux, tu y laisses un bout de coeur. Pour le meilleur et pour le pire.
Je n’ai jamais idéalisé le monde mais je trouve qu’il est terrible à regarder quand tu es maman. Les attentats, les faits divers, la crise économique et toute la violence ordinaire, je voudrais plutôt des bisounours pour mon fils. Mais on n’est pas heureux non plus si on vit dans une bulle. Il faut les nourrir d’amour et leur faire confiance.
Je me rappelle une dame, déjà grand mère (peut-être même arrière grand mère) qui se faisait beaucoup de souci pour son fils qui divorçait. Je lui demandais si on ne s’arrêtait jamais d’être mère. Elle me répondait que non, c’était encore pire quand ils grandissaient car on ne pouvait plus les protéger autant.
Bonjour Flore,
Cet article résonne tellement en moi. Je viens d’inscrire mon fils à l’école et même si la rentrée est encore loin, je ne peux pas m’empêcher d’appréhender ce moment où il ne sera plus dans son « cocon ».
Bon week-end à votre et famille et vous !
C’est le « sort » de toutes les mamans une sorte de contrat que l’on a accepté dès le moment ou l’envie d’avoir un enfant a pointé le bout de son nez.
On les aime tellement et quelque part on est obligé d’accepter certaines souffrances…
On devient maman et une fois que l’on est c’est pour la vie.
Quel doux article plein de justesse Flore… C’est si vrai tout ça… De la dureté du quotidien à ce « pacte » tacite : donner la vie et tout ce qui va avec : Le package !!
C’est un paradoxe souvent compliqué à gérer pour les mamans que nous sommes… L’aimer mais pas trop, l’aider mais pas trop, l’accompagner mais pas trop, le protéger… Mais pas trop…
Je me retrouve toujours autant dans tes doux mots …
Merci !
Je te comprends tellement <3…
Oh comme je te comprends ! Avec mes petits loulous de déjà 7 et 4 ans, j´ai de plus en plus envie de les protéger et je dois de plus en plus leur laisser de la liberté : pour l´école, les activités, les vacances avec les cousins… Bref, je reve de pouvoir partager tout leur quotidien dans les moindres details ! Et j´avoue que je laisse également passer chaque enfant que je vois à un passage piéton ! Et meme les grands : si je suis dans ma voiture, j´ai moins froid qu´eux donc à eux la priorité !!! 😉
A la naissance de mon fils, j’ai réalisé ce que c’était que de se faire du souci. Angoisser à l’idée de ne pas pouvoir agir pour protéger son enfant. Une véritable souffrance… Il faut apprendre à vivre avec. Je fais donc des efforts… La scène que tu décris du petit garçon attendant pour traverser, je la ressens très souvent quand je vois un enfant seul dans le métro avec son gros cartable, quand j’entends des histoires harcèlement scolaire ou de manière plus extrême quand je vois des accidents dramatiques causant la perte d’enfants… Il est impossible de protéger son enfant de tout, tout le temps. Ce qu’il nous reste ? Les aimer très fort, échanger énormément avec eux, être là pour eux.
Très joli témoignage que je partage avec toi. J’ai vécu cette situation bien des fois (travaillant avec des enfants) où les adultes, parents et professionnels, passent à côté de la souffrance ou simplement d’un bobo d’un enfant… Et toujours ce sentiment de tristesse en moi. Mais comme tu le dis c’est la vie. On ne peut pas protéger nos enfants de tout !! Alors à nous de les armer le mieux possible pour qu’ils passent ces épreuves, ces passages, ces moments le plus sereinement possible. mes enfants ont grandi : mon fils à 7 ans et demi et ma fille 3 ans. Et comme toi j’ai voulu les couver et les défendre contre tous les maux. Moi qui étais mère au foyer durant 8 ans j’ai imaginé ça comme ma mission number one !!! Et puis les bobos, les douleurs, les chagrins sont arrivés. Et maintenant quelle fierté et quel soulagement j’ai à chaque fois qu’ils viennent m’en parler pour avoir un conseil ou me dire comment ils s’en sont sortis seuls !!!!!! Un long chemin s’ouvre devant toi et il est beau et plein de partage…
Pfiou…j’ai de la tendresse moi aussi pour ce petit garçon.
Ma plus grande crainte c’est de passer à côté de quelque chose (je pense à l’adolescence hein)…comme du racket, ou la drogue, les mauvaises fréquentations, le harcèlement…quand j’entends des suicides de petits de 10 ou 11 ans, ça me sidère. Comment peut-on en arriver là si jeune? Comment les parents se reconstruisent après un tel drame où ils se sentent forcément coupables de n’avoir rien vu venir? Pour autant, j’espère veiller à laisser une grande liberté à Junior. J’espère arriver à lui transmettre une façon de penser, de balancer le pour du contre, de juger du bien ou du mal pour qu’il s’auto-protège en quelque sorte car on ne pourra pas être derrière lui à chaque instant.
Je ressens exactement la même chose même si mon petit bout n’est encore qu’un bébé… Encore hier soir, je pensais à tout ça, à tous ces gens mal intentionnés au dehors et ça me fait très peur pour lui!
J’en profite également pour dire que j’adore ton blog, bravo pour son succès, tu le mérites (:
C’est une des moins chouettes parties du job de maman je trouve, on s’est blindé pour supporter notre souffrance, mais voir la leur nous perce le coeur. On ne peut pas les protéger de tout, on peut juste les accompagner, comme le reste. Mais parfois ça pique.
On aimerait les garder avec nous le plus longtemps possible et les protéger mais c’est en volant de leurs propres ailes qu’ils apprennent à s’endurcir, dès la crèche en ne se laissant pas piquer leur jouet préféré et tout au long de leur apprentissage mais je te rejoins à 200% c’est pas facile pour nous maman de voir toutes les difficultés qu’ils pourront rencontrer comme ce petit garçon…
Comme je te comprends à 200%
Je vis près d’une école et je vois ce genre de scène quotidiennement. Parfois j’assiste à des jolies choses et parfois ça me retourne les entrailles. Je suis contente que mon Crapouillou n’aille pas encore à l’école, je ne sais pas comment je survivrai à sa première rentrée !
J’aime beaucoup ton article. Je me reconnais tellement dedans… ce coeur qui se brise dès que les larmes pointent au coin de ses grands yeux…. dès qu’on voit une injustice mais qu’on doit la laisser vivre ses premières expériences… et ce coeur qui a grandi pour accueillir PetitPrince et qui va se briser deux fois plus souvent… heureusement qu’il se répare tout autant et encore plus qu’il ne se fendille… la vie de maman nous fait découvrir des émotions que nous n’aurions même jamais osé imaginer pouvoir ressentir <3